L’analyse de trois récits de vie de femmes haïtiennes émigrant en Martinique et ayant recours aux sexualités transactionnelles (ST) aide à comprendre le rôle de la sexualité dans les stratégies de « normalisation » administrative et sociale des femmes les plus précaires. Chacun des récits illustre un modèle de ST : la prostitution au sens strict, le mariage comme continuité du « plaçage » existant en Haïti et les ST impliquant un partenaire ressource (voire un multipartenariat sériel). La sexualité révèle des conduites féminines complexes où, d’un côté, les femmes essaient de détourner à leur profit les règles du modèle patriarcal et, de l’autre, se heurtent au cadre normatif qui définit l’autorisé et l’interdit du féminin. Ces ST montrent que la migration ne remet pas en question les rapports sociaux de sexe et peut même renforcer la domination sur les femmes quand on considère l’articulation des rapports de « race », de classe et de sexe, et le rapport pays « développé »/« tiers-monde » qui forment une matrice de domination.
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