Au cours de ces deux dernières décennies, les étudiants internationaux ont été l’objet d’études de nombreuses recherches (Bureau canadien de l’éducation internationale, 2017 ; Chatel-De Repentigny, Montmarquette & Vaillancourt, 2011 ; Hou & Lu, 2017 ; Williams, Williams, & Abuckle, 2015, Fortier, 2007 ; Maïnich, 2015 ; Millet, 2000 ; Terrier, 2009 b, 2009a ; Vultur & Germain, 2018). L’intérêt porté sur les étudiants internationaux a été sans appel tant que leur population en mobilité continuait d’augmenter depuis 2010 en atteignant 2 millions en 2017 (UNESCO, 2020) dans les différents pays de l’OCDE. Dans le cas du Canada, ils représentent depuis 2017, 14 % de la population estudiantine du pays soit 296 469 personnes (Statistique Canada, 2020) et leur contribution en termes de PIB représentait respectivement 10,5 milliards de dollars en 2015 et en 12,8 milliards de dollars en 2016 (Affaires mondiales du Canada, 2017). Pourtant, derrière ces variables statistiques fort intéressantes, il y a des individus en déplacement, des hommes, des femmes, et parfois des enfants qui accompagnent leurs familles. Ce sont aussi des projets de vie, de couple et de famille. Cette thèse s’intéresse donc à la dimension familiale et conjugale des étudiants internationaux en prenant appui sur la loi de l’immigration de 2014 autorisant les étudiants internationaux à faire une demande de permis de travail ouvert pour leurs conjoints et conjointes. Cette thèse analyse donc le rapport qui résulte de la différenciation des permis au sein du couple (permis d’étude pour l’étudiant et permis de travail pour la conjointe) en partant des cas des étudiants internationaux haïtiens au Canada non boursier et de leurs conjointes. Nous avons pu appréhender notre objet d’étude en mettant en relation la sociologie de l’immigration dans la perspective d’A. Sayad (1999) et de la sociologie des rapports de sexe en empruntant la grille de consubstantialité des rapports sociaux (Kergoat, 2009). À la suite des analyses des récits biographiques, ce travail a pu mettre en évidence comment les rôles sociaux de sexes ont tendance à se redessiner au sein du couple d’étudiants internationaux haïtien. En raison du fait que, les femmes, les conjointes détenant les permis de travail parviennent à prendre la charge économique du foyer conjugal dans le contexte canadien à l’opposé du contexte haïtien où les hommes jouaient ce rôle. La thèse apporte aussi des éclairages sur la prise de décision quant au projet d’étude et aux projets migratoires en démontrant que dans la majorité des cas, ce sont les projets des conjoints (les étudiants) qui passent en premier plan au détriment des projets des conjointes. Même si toutefois, il y a dans plusieurs cas, une négociation, un arrangement qui se fait en vue de l’obtention de la résidence permanente qui aboutit au projet de mobilité du couple. Ce travail permet de mettre en évidence également la situation de déclassement et de discrimination auxquels font face les étudiants et leur conjointe au Canada.
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